Trois organisations syndicales du groupe La Poste (CGT, SUD-PTT et CFDT), représentant à eux trois 70 % des suffrages exprimés lors des élections professionnelles, ont appelé à la grève le 13 mars, une première pour le nouveau PDG Philippe Wahl.
Les syndicats ont en effet constaté que l’équipe dirigeante du groupe met en place un nouveau plan stratégique pour leur plus grand profit. La présentation en janvier par Philippe Wahl de ce plan baptisé « La Poste 2020 : conquérir l’avenir », a réaffirmé le poursuite d’une transformation profonde du groupe, « loin de répondre aux défis posés, pointe la fédération CGT des activités postales (FAPT-CGT), dans un courrier adressé le 26 février à Philippe Wahl. Le plan se situe dans la logique de la stratégie des dernières années où le personnel est essentiellement la variable d’ajustement ».
Source : La Poste
« Cette grève est motivée par les légitimes inquiétudes que suscite la présentation de la stratégie du groupe La Poste à l’horizon 2020 », ajoute SUD-PTT, qui assure que le plan, « présenté sur fond de profondes restructurations dans tous les métiers, n’apporte en effet aucun réponse aux questions de rémunération, de conditions de travail, d’emploi, et de qualité des missions de service public, notamment leur financement ».
Les syndicats mettent en cause le modèle économique et financier promu par les dirigeants de La Poste, une entreprise publique transformée en société anonyme en 2010, dont les deux actionnaires sont l’Etat et la Caisse des dépôts. Les orientations stratégiques s’inscrivent dans une politique d’acquisitions à tout crin de sociétés privées dans les différentes holdings (GeoPost pour le colis express, Sofipost pour le courrier, La Banque postale pour les activités bancaires, Poste Immo, pour l’immobilier), regroupés autour de l’enseigne La Poste (qui gère notamment La Poste mobile).
Les hauts dirigeants veulent en faire un « groupe multimétier et multicanal leader dans les services de proximité » les plus rentables, et constituer un mastodonte privé qui détient pas moins de 270 filiales, aux rémunérations de plus en plus attractives pour eux. Loin du service public postal.
Source : SUD-PTT
Les salariés de La Poste assistent ainsi à un creusement des inégalités avec l’envolée des rémunérations de la sphère dirigeante. « Les dix dirigeants les mieux payés de La Poste ont augmenté leur rémunération de 12 % sur l’année 2013, passant d’un total de 5,1 à 5,8 millions d’euros », souligne SUD-PTT.
Source : Rapport financier annuel La Banque postale publié en 2013
Symbole de cette course aux profits, l’acquisition en 2013 pour 115 millions d’euros de la Banque privée européenne (BPE), spécialisée dans la gestion de fortune. Une volonté de Philippe Wahl, alors dirigeant de La Banque postale. Aux opérations financières s’ajoute le crédit d’impôt pour la compétitivité et l’emploi (CICE) de François Hollande qui a boosté le résultat net du groupe pour l’année 2013 et encourage les choix de la direction.
Le groupe est ainsi en excellente santé économique : ses bénéfices sont en progression de 31 % par rapport à 2012 (627 contre 479 millions l’année précédente), notamment grâce à la croissance externe du groupe et à l’abondement de 327 millions du CICE. Les actionnaires publics, la Caisse des dépôts et l’Etat, se partagent un dividende de 171 millions d’euros quand La Poste doit supporter une charge nette de plus de 500 millions pour ses missions de services publics.
Conséquence, le bilan social de La Poste est catastrophique, au point que les postiers tirent la sonnette d’alarme sur un « risque sanitaire majeur » dans le groupe, a révélé l’étude d’Astrid Herbert-Ravel, une ancienne directrice des ressources humaines de La Poste en Ile-de-France. Et le changement de stratégie, reposant sur une précarisation accrue et la dégradation des conditions de travail, n’est pas à l’ordre du jour.
Source : Astrid Herbert-Ravel
Source : Astrid Herbert-Ravel